Franck Agulhon, l’incontournable joueur de Jazz

Frank A gulhon

Michael Roponus, batteur professionnel organise  le Master class de Franck Agulhon à Tahiti.

Ce Master class destiné aux batteurs, aux apprentis batteurs, percussionnistes, musiciens ou mélomanes aura lieu ce mercredi 14 janvier à 18h dans le petit auditorium du Conservatoire.

Très actif sur le plan professionnel, Franck est également très attaché à l’aspect pédagogique de la batterie et prend le temps de transmettre son savoir. Il a décidé tout naturellement de partager son expérience et ses connaissances à  travers une méthode « ré-créative », le Franck Agulhon DrumBook transcrite et rédigée par Didier Ottaviani, de près 300 pages sortie en Mars  2014.

Franck Agulhon et sa femme Valérie Agulhon  donneront deux concerts jazz les 16 et 17 janvier 2015 au petit théâtre de l’Otac.

Franck Agulhon

Né en 1976 à Marseille, il étudie la batterie pendant 3 ans avec Phil Le Van et joue dans de nombreuses formations aussi bien Brésiliennes que Blues. En 1990, il entre au Centre Musical et Créatif de NANCY, qu’il termine avec le diplôme et les félicitations du Jury.

  •  En 1992, Diego Imbert l’invite sur son album solo, Ametys, sorti chez EMD. Il est diplômé du Drummers Collective de New York et participe au CD de Jean-Marie Viguier « Sage ». En 1997 il intègre le nouveau groupe d’Elisabeth Caumont. Il devient également titulaire du poste de batteur au sein de l’Orchestre Régional en Jazz en Lorraine et participe aux enregistrements Angustia di Amor et Hommage à Duke Elligton.
  • En 1996, il intègre aux côtés de Pierre-Alain Goualch (piano) et Daniel Yvinec (basse), le Onztet de Violons Jazz formé par Didier Lockwood, avec lequel il ouvre le Festival International de Jazz de Toulon.
  •  En 1997, avec le « Tryo » (Pierre-Alain Goualch au Piano et Christophe LEVAN à la contrebasse), il enregistre Voici ma Main qui reçoit un accueil unanime, 3 étoiles JAZZMAN, Sélection du Mois JAZZHOT.
  •  En Juin 98, il est invité par le Chet Atkins « Musicians Days » of Nashville (Tennesse) au sein du quintette de Ernie Hammes.

Ces dernières années, on a pu également l’entendre en tant que sideman aux côtés de : Archie Shepp, Bob Mintzer, Lew Soloff, Ted Curson, Bobby Shew, Toots Thielmanns, Julia Migenes Johnson, Sylvain Luc, Dominique Di Piazza, Eric Le Lann, Antonio Farao, Elisabeth Caumont, Pierre Jean Gaucher, Emmanuel Rocheman, Jean Loup Longnon, Stéphane Belmondo, Olivier Temine, Viviane Ginape, Hervé Meschinet, Pierrick Pedron, Sylbain Beuf…

Aujourd’hui reconnu comme un des batteurs les plus prometteurs de sa génération, il développe un jeu personnel original qui puise aussi bien dans la tradition des grands batteurs de jazz que dans la musique brésilienne, cubaine et funk.

Franck Agulhon

Reportage de Guillaume Pihet.

Comment as-tu débuté la batterie (autodidacte, cours …) ?

F.A : j’ai débuté la batterie en février 1986 à Marseille avec Philippe Levan. Il m’a donné les ficelles pour accompagner différents styles en me faisant travailler des patterns Funk, Afro, Bossa Nova, Blues, Jazz… de quoi me débrouiller en groupe en fait. Il m’accompagnait au piano pendant les cours. Pour l’anecdote, j’ai enregistré mon premier disque en mai 1986 avec une chorale de jazz/funk. Je ne sais pas comment j’ai fait… A l’oreille je pense, car le fait d’avoir tout de suite joué avec un prof qui m’accompagnait au piano, m’a beaucoup apporté. En parallèle j’ai beaucoup bossé par moi-même dans ma cave dès les premiers mois.

Travailles-tu ton instrument tous les jours ? Comment travailles-tu et quoi (technique, son ?…)

F.A : J’ai beaucoup travaillé mon instrument de façon assidu à l’époque ou je faisais moins de concerts. Actuellement j’ai moins de temps pour faire un travail de fond à la maison, ce qui d’ailleurs me frustre. J’aimerais pratiquer plus, mais je ne vais pas refuser de faire des concerts ou des interventions pour me retrouver seul dans ma cave (rires). Mais dans l’absolu j’aimerais passer plus de temps pour développer mes idées et combler mes lacunes.

Mais j’essaye tout de même de bosser quotidiennement ma technique sur des coussins ainsi que ma gestuelle, les épaules…. Je travaille également les répertoires que j’ai à jouer. Si je suis confronté à un style ou un rythme que je ne connais pas vraiment, je fais un travail de fond. Ou par exemple, lorsque la métrique d’un morceau est en 19/4, là je programme la clave sur un séquenceur et je joue par-dessus .Je dois passer par un stade analytique avant d’arriver au stade organique. Quand aux indépendances, systèmes, etc., je les travaille en cours avec les élèves.

Joues-tu d’un autre instrument ? As-tu travaillé l’harmonie ? Joues-tu des percussions ?

F.A : Non, je ne joue pas d’un autre instrument. J’estime avoir une bonne oreille mélodique, je sais me repérer, j’entends les grilles, retient les mélodies, mais je serais incapable d’écrire un morceau avec une feuille et un crayon.

Quant aux percussions, oui et non. Je les aime toutes, je connais les rythmes, les principaux codes, je joue un peu de congas mais je n’ai pas un brin de son. Je n’ai aucune technique spécifique liée à une percussion. Sauf peut-être les timbalès, ou la caisse claire brésilienne que j’ai jouée en école de samba. Mais j’aime vraiment les percussions, comme les tablas, je n’y comprends rien mais je me régale quand j’en écoute. J ‘ ai d’ailleurs un peu étudié les rythmes indiens et j’adapte les principes à mon jeu.

Par contre j’utilise souvent la batterie comme une percussion, en jouant avec les mains, ou avec une baguette et une main pour jouer des patterns afro. Je m’inspire des phrasés de percussions pour les adapter à la batterie, j’écoute beaucoup des percussionnistes comme Giovanni Hidalgo, Anga Diaz, Minino Garay, Orlando Poléo, Mamady Keïta et beaucoup d’autres.

Comment as-tu géré ton parcours scolaire (Bac, etc.…) et ta passion pour la batterie ? Quand as-tu eu envie d’en faire ton métier ? Qu’est-ce qui a motivé ce choix ?

F.A : Au départ, mon père m’a dit que si j’avais mon DEUG, il me laisserait faire de la batterie. Et comme la batterie, j’aimais ça, et que ça marchait pour moi, l’exigence est descendu au BAC. Il est allé voir le proviseur de mon lycée pour que je n’aie cours que le matin certains jours. Comme ça je passais ses après-midi et mes soirées sur la batterie. Tout étais organisé, j’avais des classes aménagées….. (Merci papa) J’ai eu mon BAC au rattrapage ; à l’arracher quoi !!! (Rires), mais je l’ai eu ! J’arrivais souvent fatigué en cours car je jouais déjà 3 ou 4 fois par semaine dans des piano-bar.

La batterie est toujours restée une PASSION, il faut toujours s’amuser et prendre du plaisir à en jouer .Ensuite tout s’est enchaîné naturellement, j’ai eu la chance de faire beaucoup de rencontres (grâce au CMCN). Et un parcours est souvent lié aux rencontres. Daniel Yvinec, André Charlier, Alain Gozzo, Patrick Manougian, sont des gens qui m’ont mis le pied à l’étrier dans le milieu parisien. J’ai un contrat avec TAMA depuis 12 ou 13 ans, grace à Alain qui m’a toujours fait confiance, depuis le début..

Qu’est-ce qui a selon toi « lancé » ta carrière ?

F.A : Je n’ai pas de notion de carrière. J’ai toujours essayé de bien faire se que j’ai à faire, que ce soit les concerts ( gros ou petits ), les cours au MAI,les cours particuliers, ma première Bat night, la Bag show, les salons, mon premier disque, mon deuxième… En vivant les choses pleinement et sincèrement. Les projets se sont toujours enchaînés et je m’investis avec la même passion et le même enthousiasme dans chacun d’eux.

Te-consacres-tu plus à des formations jazz ?

F.A : Oui, mais un Jazz avec un grand J. Un Jazz au sens large, métissé (traditionnel, hard bop, électro jungle, world, latin, afro, musique contemporaine…). C’est compliqué de définir un style. Qu’est-ce qu’un style ? Je ne joue pas que du Jazz au sens où on l’entend, style « jazz Chabada ».

Tu joues d’autres styles musicaux ? Si oui lesquels ?

F.A : Moi je viens du Blues et du Funk au départ, même si je n’en ai pas joué des années et des années. J’ai fait beaucoup de caisse brésilienne. Je connais pas mal de styles, que ce soit dans l’Afro, la musique cubaine, ou indienne, mais pas vraiment en profondeur. Ce sont des éléments dans lesquels je pioche pour obtenir différentes couleurs. Ce que j’aime avant tout, c’est l’aspect percussif de la musique, la mise en rythme de sons et aussi la mise en sons de rythmes. Quand j’étais étudiant à Nancy, j’allais souvent à la médiathèque pour écouter plein de CD dans différents styles, de différents pays.

Quel est ton meilleur concert ? Et le moins bon ? Une anecdote ?

F.A : C’est délicat de définir le meilleur concert. Dans l’absolu, c’est quand tous les musiciens jouent bien, ont la banane, et que le public est en phase avec la musique que l’on joue. Le moins bon, c’est celui où tu réfléchis trop en jouant. Je ne garde pas vraiment souvenir des bons concerts, je retiens plutôt les moyens. J’essaye de me faire le cheminement du « pourquoi » tel concert a été moins bon, pour réagir par la suite. Pour l’anectode, le big « ouwaou » que j’ai ressenti en remplaçant André Cecarreli avec Stéphano Di Batista. André, je le voyais en masterclass quand j’avais 18 ou 19 ans, et la première fois que je l’ai remplacé, j’ai eu mon petit moment » émotion ».

Ressens-tu du stress avant un concert et si oui comment le gères-tu ?

F.A : Oui, je ne sais pas si c’est du stress mais je ressens un truc. C’est directement lié à la journée que je viens de passer ? Si je suis fatigué par exemple, j’y suis un peu plus sensible. Je le gère en buvant de l’eau, en faisant des étirements, en essayant de discuter d’autre chose que ce qui va se passer. Je ressens toujours du stress, mais avec le temps et l’expérience, je le gère mieux. Mais c’est tellement aléatoire le stress, parfois j’ai des grosses manifestations, filmées, enregistrées, où je ne le ressens pas. Parfois je joue dans un petit club devant 30 personnes, et là une personne bien particulière rentre, et la pression monte.

Est-ce que tu t’échauffes avant de jouer ? Comment ?

F.A : Je m’échauffe pour les master class, car pour commencer en solo, mieux vaut être chaud un minimum.. Quand tu dois jouer 45 mn tout seul, et que tu n’es pas chaud, y’a un coup dans les 20 mn où ça commence à tirer sérieusement. Pour m’échauffer, je m’étire les épaules, les bras, les jambes, etc.… Parfois je me mets par terre sur le dos pour faire de la respiration, parfois je fais des frisés sur un coussin, mais sans forcer. En concert, généralement, je fais monter la sauce petit à petit, je commence cool.

Répétez-vous en groupe ? Ou arrivez-vous en studio avec les thèmes en tête sans avoir répété pour plus de spontanéité ?

F.A : C’est un peu un mélange des 2 en fait. Souvent on répète beaucoup avant, on fait quelques concerts. Puis on s’aère l’esprit quelques jours. Ainsi on arrive en studio frais et dispo, avec les structures en tête. C’est souvent les premières prises qui sont les meilleures.

Quels thèmes abordes-tu en cours ? Quel est LE message que tu veux faire passer ?

F.A : Ca dépend du niveau des étudiants. Mon message : toujours prendre du plaisir à jouer et surtout à travailler !

Quelles sont les méthodes indispensables à travailler selon toi ?

F.A : Y’en a plein : le « Stick Control », les bouquins de Garee Chaffee, le premier de Gary Chester, « the New Breed », les indépendances de Jim Chapin. Les textes des méthodes Agostini m’ont beaucoup servi de support pour les systèmes jazz et autres. La méthode de Jack Dejohnette également.

Avec le recul, c’est très important de travailler les rudiments, et de les mettre directement en application en Musique. Donc travailler, roulé, frisé, ras… tout en travaillant des patterns d’ application dans différents styles de musique.

Penses-tu qu’il soit nécessaire de maîtriser le solfège ?

F.A : Nécessaire non, ça ne fait pas des meilleurs musiciens, mais ça fait gagner beaucoup de temps. En répétition par exemple, ou pour travailler des méthodes de batterie.

Faut-il un niveau certains en jazz avant de jouer dans une formation ?

F.A : Si on connaît les codes, on n’a pas besoins d’une grosse expérience, ou d’un gros niveau technique. Par contre jouer en formation fait vraiment progresser, car on met son travail en application.

Qu’est ce qui fait que l’on « catégorise » une musique dans le style Jazz ?

F.A : Les médias. Ou quand la musique est instrumentale. Mais toutes les musiques actuelles proviennent du Jazz. Il faut apprendre à connaître la filiation des groupes qu’on écoute, Led Zep provient du Jazz. Et les jeunes générations devraient s’ouvrir aux musiques qui ont influencé leurs idoles.

Pour toi, être musicien de jazz est-il un aboutissement, ou penses-tu que tous les styles de musique soient aussi respectables ?

F.A : Toutes les musiques sont respectables. Tous les mecs qui jouent à haut niveau dans leurs styles sont très forts et très respectables. C’est vrai que beaucoup de musiciens rock ou métal s’ouvrent au jazz. Mais le jazz n’est pas forcément une musique élitiste.

Pour finir, la question rituelle de Tob! Avec qui aimerais-tu aller boire un verre (qu’il soit vivant ou non) ?

F.A : mon papa.


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