Veux-tu être mon amie ? Tu me prêtes ta robe bleue ? T’es libre le samedi 26 c’est pour un truc ? Tu peux m’aider ? Tu peux venir ? Dire oui à tout est souvent la solution la plus facile. Enfin, jusqu’à ce que ça se complique parce que justement, on aurait mieux fait de dire non. C’est décidé, j’y mets un peu de volonté.
Je suis gentille mais là c’est non !
Au secours ! Depuis quand c’est comme ça ?
Il me semble me souvenir d’un temps où ça ne se passait pas pareil. Où bien sûr qu’on me demandait un service de temps à autre, bien sûr que je le rendais bien volontiers. Et je ne sais pas ce qui s’est passé: est-ce que c’est mon entourage qui a pris le pli, est-ce moi qui volontairement ou non les y ai encouragés?? Est-ce que j’ai peur qu’on ne m’aime plus si je refuse, ou est-ce que ça me valorise d’être celle à qui on fait toujours appel ?
Suis-je anormalement bien élevée et dans ce cas comment se fait-il que je ne fréquente apparemment que des malappris ? Et à force de dire à tout le monde « Mais oui je t’en prie avec plaisir » est-ce que ça ne serait pas à moi que je dirais non ? Parce qu’il faut bien reconnaître que c’est avec de plus en plus de mauvaise grâce que je dis « oui », avec une sorte de ras-le-bol qui monte, de mauvaise humeur, de colère, et peut-être même un peu de tristesse : c’est quand mon tour ?
Tout à coup je réalise : être trop gentille rend grognon, voilà qui est contre-productif. Il faut que ça change !
Ça vous dit quelque chose ? Ça vous rappelle quelqu’un? On a toutes au fond de nous une gentille fille qui parfois se fait avoir. Ça fait partie de la vie, et la gentillesse est une attitude qui vaut d’être tentée, en plus de donner nettement meilleure mine que l’amertume. Mais c’est comme tout : question de dosage. De limites. Là c’est oui. Là c’est non. Ça demande un peu de courage, et surtout un petit entraînement.
Alors ça va changer. Sans trop m’interroger sur le pourquoi, sur le peut-être que dans mon enfance, ou le est-ce l’époque qui veut ça. Je vais me concentrer sur le comment. Comment me respecter, comment dire non.
Car que vaut ton oui, si tu ne dis jamais non ?
J’apprends à dire non !
Vous avez peut-être comme moi tendance à dire oui trop vite pour le regretter plus tard. Comme quand j’ai accepté d’aider une vague copine à déménager. Si j’avais dit non, ça m’aurait peut-être évité de faire ses cartons en plus de les porter, et de recevoir un coin de lit sur le pied.
En parlant de déménagement, j’ai fait le mien il n’y a pas longtemps. Avoir un nouvel appartement, je trouve toujours ça assez excitant. J’attends avec impatience de choisir où poser tous mes cadres photos et d’acheter des bougies assorties à mes rideaux. Je changerai probablement mes meubles trois fois de place pour trouver le meilleur emplacement possible et alors, je me sentirai chez moi.
Seulement il faut passer par la corvée : vider les cartons, et un truc que je déteste c’est bien le rangement. Là, pas de problème, je suis très forte pour me dire non : « Non, aujourd’hui j’ai vraiment trop de travail, ce truc à rendre pour dans un mois, pas le temps. », « Non, cet après-midi, je vais plutôt aller boire un verre avec Catherine, je ne l’ai pas vue depuis deux jours, c’est insoutenable. ». Mais puisqu’il faut bien s’y mettre, je me suis décidée ce jeudi-là à me lever plus tôt, pour finir de travailler plus tôt, pour enfin venir à bout de ce déménagement et de ces cartons qui traînaient dans mon appartement depuis trop longtemps.
Là, j’étais mo-ti-vée.
Motivée, jusqu’à ce que mon téléphone sonne. Le nom de ma copine Mathilde s’affiche.«Concert, ce soir??» Ah. Un concert, c’est très tentant ça, bien sûr que je veux venir ! Le plus gros des cartons me regarde bien en face. Euh… peut-être pas en fait. Je dis non à Mathilde. Ce soir, je range, j’en ai marre de vivre dans un champ de bataille. Elle insiste un peu, rater un concert pour faire du rangement, c’est un peu ridicule.
Je sens ma volonté flancher, il est temps de raccrocher. Je regrette déjà mon non. Ils auraient bien attendu un jour de plus ces cartons… Allez, du courage, un thé et je m’y mets !
Bilan : une soirée pas exaltante exaltante, mais le lendemain quand je me réveille enfin chez moi, c’est avec une tonne de culpabilité en moins. C’est un mieux. Pas énorme, hein. Mais un mieux.
Et re-non !
Arriverais-je à dire non plus facilement la prochaine fois? L’occasion se présente avec un nouveau mail qui m’attend dans ma boîte. Mon cœur oublie de battre un instant en voyant le nom de l’expéditeur: c’est Ex-Sans-Cœur, celui qui aime apparaître et disparaître régulièrement de ma vie sans crier gare. J’ai beau le savoir, ça me surprend toujours.
Et tiens, le voilà qui s’excuse pour la dernière fois et pour «avoir vraiment mal agi». Ah oui, voir une autre fille dans mon dos en effet, c’était pas très sympa. Bien sûr, il aimerait pouvoir s’excuser en vrai, peut-être en m’invitant à boire un verre? Je commence à le connaître moi le garçon.
Petit tour sur Facebook pour le confirmer: Ex-Sans-Cœur est de nouveau célibataire. Mais je me connais aussi. Je sais très bien que j’ai envie de dire oui sous prétexte de me prouver que je peux le voir et ne plus rien éprouver. C’est risqué car il est un peu ma kryptonite à moi, et il s’y prendra sûrement si bien que c’est moi qui commencerai à le plaindre. Ça suffit. C’est là que je lui dis non. Et re-non.
Et pas la peine de me recontacter. Je suis passée à autre chose.
Je me sens plus légère tout d’un coup… Si j’avais su, j’aurais dit non plus tôt. J’aurais peut-être évité de me briser le cœur au passage.
Ai-je trouvé le mot magique ?
Avec un peu de pratique, je commence déjà à mieux y arriver. Pas facile de s’imposer face à quelqu’un d’impressionnant ou de déroutant, mais en prenant sur soi et sur sa peur, les choses passent mieux. Et en faisant quelque chose de difficile, on gagne en confiance en soi.
Dans la foulée du non à Ex-Sans-Cœur, je dis non au collègue qui me prend pour sa secrétaire, à ma mère qui me demande encore si je peux prendre son chien ce week-end, ben non, tu as voulu un chien maman tu t’en occupes, dingue c’est moi qui prononce cette phrase ! Je dis non au verre de vin à déjeuner, résultat, c’est agréable de passer l’après-midi avec la tête claire, non à la sortie en boîte quand j’ai un gros boulot à rendre pour le lendemain.
Mais il me semble que le non est à consommer avec modération. Par exemple, il y a trois ans, j’étais invitée à une fête à laquelle je n’avais pas envie d’aller, mais je n’ai pas osé dire non. Or, c’est là que j’ai rencontré un de mes meilleurs amis d’aujourd’hui. Alors finalement, le mot magique, c’est non… Ou c’est oui ?
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