Hinavai, envoutante, divine et céleste

Hinavai est une danseuse à l’univers empli de grâce et de force, sa danse est douce et de caractère. Elle est bercée par les rythmes traditionnels où la musique est entièrement liée à la danse, l’union des deux crée un spectacle lumineux et chaleureux.

Son intérêt pour la danse est visible par sa recherche quotidienne dans le travail de musicalité, d’écoute des autres danseurs et sa volonté de danser dans un but précis d’expression. Pour elle la danse est synonyme de liberté, de communication et d’évolution.
Vivre dans un univers « dansé » dans lequel prônent le plaisir et le côté humain, est devenu primordial et est sa seule priorité.

Elle commence très jeune la danse et se passionne rapidement par la rigueur de la discipline enseignée au Conservatoire de Tahiti.
Elle transmet son plaisir de danser au public. Elle projette une grande force, une vitalité par son charisme et son dynamisme. Elle est tout d’abord dans le besoin de plaisir et d’agréable et c’est ce qu’elle enseigne à ses élèves.

Cette année Hinavai est sacrée meilleure danseuse par le Jury du Heiva.

Elle interprète le levé de Lune, astre dont elle s’inspire pour transfigurer l’attraction qu’elle-même exerce sur Tahua Toata.  Son talent et la magie du spectacle ont fait le reste…

Moving Tahiti : Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Hinavai Raveino : Je suis de nature très réservée mais avec mes proches j’aime la moquerie gentille.

M.T : Comment as-tu  intégré le monde de la danse ? qu’est ce qui t’a donné l’envie d’être danseuse ?
H.R : A l’âge de 5 ans, ma maman voulait nous inscrire (ma petite sœur Ninira’i et moi) au Conservatoire. Il fallait qu’on ait une activité en dehors de l’école et elle voulait qu’on suive les cours de danse avec Mamie( Louise Kimitete) et Vanina ; deux femmes qui nous ont beaucoup apprit depuis petite jusqu’à aujourd’hui.  Depuis je n’ai jamais quitté le Conservatoire et aujourd’hui j’y enseigne à mon tour, toujours avec Vanina et Moon. J’ai commencé mon tout premier Heiva avec Hitireva. C’est là que cet amour pour la danse s’est vraiment concrétisé.

M.T : Quelle formation as-tu suivi ?
H.R : J’ai  commencé à passer le premier examen de danse au Conservatoire puis après j’ai passé tous les examens suivants jusqu’à obtenir l’examen de danse final que l’on appelle le D.E.T (Diplôme d’Etudes Traditionnelles). Ce diplôme est validé sur 3 ans, à savoir 1 examen de danse par an avec 3 U.V (Unités de Valeurs) que l’on valide au bout de 3 ans. L’U.V de Culture Général est obligatoire, mon deuxième U.V  étant la Chorégraphie (participer aux cours avec le professeur et savoir donner un cours de danse etc…) et mon troisième U.V ‘orero. Pendant la même année, je passais mon baccalauréat ES avec mention. A la rentrée suivante, j’ai été formée par Mamie pendant un an. Tous les lundis et mardi matin, elle me montrait comment on écrivait un pata’uta’u (une cantine en tahitien), comment on créait une chorégraphie  à partir d’un texte, d’un thème. Elle me disait quel genre de « pehe » on pouvait donner à telle ou telle tronche d’âge car selon le niveau, l’enfant aura plus de facilité à comprendre et à mémoriser le rythme d’un « pehe ». Par exemple pour les enfants de 3 – 4 ans on mettra toujours un « pahae », ils le mémorisent très facilement  et comprennent bien le temps musical, ensuite c’est très facile pour eux de danser dessus. J’ai commencé aussi par donner les cours au Conservatoire chez les enfants, les ados et les adultes. J’ai beaucoup apprit tous les jours et puis l’année suivante j’y ai vraiment travaillé en tant qu’enseignante. Aujourd’hui ça fait 4 ans que j’y travaille.

Pendant ce temps je donnais quelques cours particulier aux étrangers qui venaient sur Tahiti. Sinon je fais des ateliers vacances à La Maison de la Culture.

En 2014, j’ouvre mon école de danse sur Taravao tout en continuant d’enseigner au Conservatoire. Cette année je continue avec mon école sur Taravao en rajoutant les cours pour les garçons qui seront assurés par Toanui Mahinui. Il enseigne également au Conservatoire.

Et puis ce titre de meilleure danseuse qui se rajoute à mon parcours est un plus pour mes projets professionnels.

M.T : Combien d’heures d’entrainement as-tu chaque semaine ? Comment se déroulent ces entrainements ?
H.R : Si je compte les heures de danse tout simplement au conservatoire, à mon école et aux répétitions ça me fait au moins 29 heures de danse par semaine. Avec mes entraînements pour me préparer au concours de meilleure danseuse de ce Heiva 2015, je peux rajouter quelques heures par semaine.

Les répétitions du soir c’est plutôt soit pour le Heiva, soit pour le Hura Tapairu. C’est 2 heures minimum de répétitions chaque soir. C’est très physique et mental. C’est intense et on rentre tard le soir, 21h et des fois plus tard. C’est un sacré investissement personnel et ça demande beaucoup de sacrifices.

M.T : De quoi est fait le quotidien d’une danseuse ?
H.R : Une danseuse vit la nuit car c’est le seul moment où l’on peut répéter avec tout le groupe de danse, de musiciens et de choristes. A 18h la répétition démarre, à 21h ça se termine par un rassemblement du groupe où le chef de groupe s’exprime sur ce qui ne va pas, sur ce qu’il faut arranger etc… Ce sont de nouvelles rencontres, de nouveaux chants, de nouveaux sons etc… Puis on rentre la tête reposée et des fois on mange toute seule tout simplement parce que la personne avec qui on partage sa vie a déjà mangé ! Ben oui il est 21h passé ! C’est là qu’on se rend compte qu’il y a un grand engagement personnel, où on a moins de temps pour sa vie personnel. Quand on s’approche du jour J, on se met à faire nos costumes, alors on demande à sa sœur ou ses amis de nous aider. Ça créée des bons moments de rassemblement où l’on peut discuter et parler encore de danse. Bref vous l’aurez compris, le quotidien d’une danseuse c’est vivre danse, penser danse et parler danse.

M.T : Les exigences sont-elles différentes pour un danseur et une danseuse ?
H.R : On veut voir une danse qui joue avec son charme, sa beauté, qu’elle soit gracieuse et élégante et bien sûr le tour est joué. On attend de voir chez un homme sa virilité, qu’il joue avec le public dans sa danse et bien sûr qu’il soit beau quand il danse.

M.T : Pratiques-tu d’autres sports ?
H.R : Je n’aime pas trop le sport pour faire du sport mais je fais un peu de paddle plus pour le « fun » et pour passer un bon week-end au soleil.

M.T : Quel est le secret nutritionnel d’une danseuse pour allier force physique et minceur ?
H.R : Je pense que pour être prête physiquement il faut bien manger et favoriser les aliments légers et faciles à digérer. Pour ma part je ne suis aucun régime et je mange ce que j’ai envie de manger matin, midi et soir, je me prive de rien. Par contre pour tenir la forme je prends des vitamines tous les matins et ça m’aide beaucoup. Même si certains groupes de danse montrent une nouvelle image de la danseuse tahitienne très fine, je trouve beaucoup plus agréable de voir les rondeurs d’une danseuse.

M.T : Tu es la fille d’un musicien célèbre. Depuis ta naissance, tu es bercée par la musique, ce qui a sans doute considérablement influencé ton écoute musicale ! Est-ce un atout lorsque tu improvises ou crée des chorégraphies ?
H.R : Il n’y avait pas un jour sans musique à la maison, que ce soit un concert ou tout simplement de la guitare, mes sœurs et moi avions été bercées par la musique. Avoir l’oreille musicale c’est très important dans la danse. Il faut savoir compter les temps sur un chant ou sur une musique traditionnelle. C’est la clé pour créer.

M.T : Penses-tu qu’il est important de bien connaitre notre histoire et notre culture pour interpréter une chorégraphie ?
H.R : Il faut surtout comprendre le thème, le sujet, le texte pour pouvoir créer une chorégraphie. Il faut bien-sûr connaître notre histoire pour pouvoir comprendre nos légendes et savoir les interpréter.

M.T : Tu enseignes la danse ; des  techniques et des chorégraphies traditionnelles… As-tu choisi la façon académique ou tentes tu d’innover, de moderniser cette discipline ?
H.R : Au Conservatoire on apprend tous les pas de base, les noms des pas, la technique des pas etc… c’est un enseignement très complet. Ayant été formée au Conservatoire, j’ai gardé cette façon assez académique d’enseigner. Bien-sûr avec les ados on change un peu la donne et on met des musiques qu’elles écoutent pour les échauffements. Ça détend l’atmosphère et on les voit sourire ! Pour qu’elles s’intéressent à la danse à cet âge là et surtout pour qu’elles persévèrent il faut que nous aussi on leur donne envie. Du coup on essaie de se mettre à leur place et c’est clair qu’il n’y a rien de mieux que de s’échauffer sur du Inna ! Mais l’apprentissage reste le même et on essaie de rajouter de l’humour pour que le cours soit vivant.

M.T : Penses-tu que l’acquisition du mouvement, du rythme et de la gestuelle est innée ? 
H.R : Rien n’est inné, tout se travaille. Mais c’est vrai que chez les polynésiens, le sens du rythme et la fluidité des mouvements sont quasiment certains. Nous avons beaucoup plus de facilité à coordonner les pas de danse avec les mouvements qu’un étranger. Les danseurs locaux ont déjà un charme qui est inné chez eux. C’est un plus qu’aucune autre ethnie ne pourrait avoir ; c’est le charme polynésien : une simplicité et une douceur dans le regard. Et je peux le confirmer lorsque je donne des cours, je vois que certaines ont vraiment du mal, d’autres un peu moins mais au bout d’un long moment de travail, je sens que ça commence à venir.

M.T : Comment transmets tu as tes élèves l’amour de la danse ?
H.R : C’est en dansant toujours avec plaisir devant mes élèves que je les emmène dans mon plaisir. Plus ils sentent que tu y prends plaisir et plus ils prennent plaisir à danser. L’amour pour la danse s’acquiert avec beaucoup de maturité. On peut adorer danser lorsqu’on est petit, mais quand on parle de l’amour de la danse c’est qu’il y a un vécu.  Je dis aux élèves qu’il faut comprendre les paroles et chanter avant de danser. C’est après que peuvent venir  les expressions du visage. Lorsqu’on danse, il faut transmettre ses émotions, il faut que le public comprenne ce qui se passe, ce que vous racontez et c’est seulement là qu’on peut sentir l’amour de la danse.

M.T : Quel est ton pas de danse préféré et pourquoi? Qu’est ce qu’il évoque comme message ou émotion pour toi?
H.R : Je n’ai pas de pas préféré car j’aime tout. Chaque pas a un sens aussi. Par exemple le pas du Tumami, on dit que c’est le travail du vagin. Il faut ouvrir les pieds, se baisser et faire un tumami en travaillant le ventre,  le dos et bien accentuer le mouvement. Ce n’est pas du tout vulgaire si c’est bien fait.

M.T : Quels sont tes projets d’avenir ?
H.R : Je pense continuer à travailler au Conservatoire tout en continuant mon école de danse à Taravao. J’aimerais beaucoup monter un spectacle mais j’y travaille petit à petit et ça viendra, un jour je verrai le bout !

Question de fin d’interview :

M.T : Que mets tu en priorité dans ton sac ?
H.R : De quoi écouter de la musique, jamais sans musique.

M.T : Si tu devais te réincarner, que choisirais tu ?
H.R : J’aimerais me réincarner en oiseau, voler très haut, prendre une bouffée d’air frais et contempler toutes les vues.

M.T : Une couleur ?
H.R : Le blanc.

Vous trouverez tous les renseignements de l’école de danse Hinavai – ori tahiti ici


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