Le script de ce film basée sur une relation conflictuelle donne à John David Washington et à Zendaya de multiples occasions de mettre en valeur leurs considérables talents.
Il est presque impossible de ne pas comparer la relation explosive de « Malcolm & Marie » à « Who’s Afraid of Virginia Woolf » et à certains films de John Cassavetes.
Mais il n’est pas nécessaire de remonter aussi loin pour comparer. Il suffit de regarder la dispute de « Marriage Story » réalisée en 2019, puis d’imaginer cette séquence transformée en long métrage.
C’est le très talentueux scénariste-réalisateur Sam Levinson qui nous présente « Malcolm & Marie ». Cent six minutes au cours desquelles deux personnes intelligentes, passionnées, changeantes, drôles, exaspérantes et, oh oui, magnifiques, se déchirent et s’arrachent avec une telle férocité leur cœur, leur âme tous crocs dehors. Ils n’oublieront jamais un seul instant de cette nuit, qu’ils vieillissent ensemble ou qu’ils partent chacune de leur côté à l’aube, en espérant ne plus jamais se revoir.
Filmé en noir et blanc dans une maison ultra moderne, toute en verre, dans un coin isolée de Carmel, en Californie « Malcolm & Marie » se joue durant toute une nuit. Malcolm (John David Washington) et Marie (Zendaya) reviennent de la première du dernier film de Malcolm, qui a connu un franc succès. Malcolm, en veste, chemise et cravate, se pavane fièrement dans la maison affichant un ego surdimensionné et chargé d’adrénaline. Alors qu’il récapitule la soirée, Marie, dans sa robe décolletée à couper le souffle, prépare des macaronis au fromage pour le diner.
Le directeur de la photographie, Marcell Rév, filme la maison et capture les deux personnages principaux en gros plans et en plans séquences si bien cadrés qu’on pourrait les photographier à tout moment et les accrocher au mur. La discussion porte sur le show-business, Malcolm se félicite des efforts qu’il déploie pour s’occuper de son travail, Marie cuisine et laisse Malcolm faire son monologue avant qu’il réalise que, oui, quelque chose la tracasse.
Sur ce, ils sortent les griffes et Marie veut savoir comment Malcolm s’en sort avec son narcissisme, sa complaisance et sa suffisance. Malcolm étripe Marie avec ses critiques acerbes, prétendant qu’elle joue toujours la carte de la victime et imagine à tort que le film ne parle que d’elle alors que le personnage principal est en fait un amalgame des très nombreuses femmes que Malcolm a connues avant d’entrer dans la vie de Marie et de la sauver.
C’est comme si nous étions arrivés aux trois premiers rounds de « Rocky », et que nous réalisions alors que le combat ne fait que commencer.
Malcolm et Marie ne sont pas et ne prétendent pas être parfaits, ils ont des défauts et de grandes qualités, parfois ils ne s’écoutent pas, ils s’enferment dans leur propre monde et accusent même le monde (ou leur partenaire) de leurs propres problèmes ou insécurités.
Le scénario dense et richement étayé de Levinson, bien que parfois trop théâtral, offre à Washington et à Zendaya de multiples occasions de mettre en valeur leurs immenses talents et d’élargir le débat bien au-delà de cette relation conflictuelle. Alors même que Malcolm se réjouit des éloges qu’il a reçus lors de la première, il note comment il a été comparé à Spike Lee et John Singleton – mais pourquoi pas, disons, à William Wyler ?
Il y a aussi une séquence marrante dans laquelle Malcolm fouille la maison à la recherche de son portable pour pouvoir lire la critique d’une journaliste blanche, et même si elle qualifie le film de Malcolm de « véritable chef-d’œuvre », il s’indigne de son ton condescendant et se lance dans un monologue enragé tandis que Marie reste assise en silence, le visage fermé derrière derrière lequel on décèle un petit sourire.
C’est une des nombreuses occasions dans ce film où l’un des acteurs occupe toute la scène et le dialogue, alors que l’autre est tout aussi subtilement présent.
Le scénariste-réalisateur Levinson a filmé « Malcolm & Marie » selon des protocoles COVID stricts après que la production de sa série « Euphoria » sur HBO ait été arrêtée à cause du virus.
En apparence, la Marie de Zendaya pourrait être une version de son personnage principal dans « Euphoria », six ans plus tard. Mais Zendaya a un tel talent qu’elle crée un personnage tout à fait original avec Marie. On pourrait regarder un film sur la vie de Marie avant cette soirée et un autre film sur ce qui lui arrivera plus tard.
Washington poursuit une carrière plus que remarquable avec le personnage intense, parfois rude et toujours passionné de Malcom.
Avec ce film, Sam Levinson montre une fois de plus pourquoi il est l’un des scénaristes et des réalisateurs les plus pertinents d’aujourd’hui, et qu’il n’est pas vraiment nécessaire d’avoir un gros budget, des milliers d’effets ou beaucoup de changements de décors pour raconter une histoire magnétique, électrisante, émouvante et hypnotique, même si cela l’a aidé à avoir Zendaya et John David Washington en tête d’affiche.
Le film a été largement critiqué et pourtant il mérite d’être regardé et apprécié !
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